Le premier e-garage de France

Direction Carquefou, en bordure de Nantes. Face à nous se dresse un bâtiment de tôle on ne peut plus classique. A l’intérieur : de quoi déstabiliser les amateurs de grosse cylindrée. Au sol, pas de trace d’huile, dans l’air, aucune odeur d’essence, et devant nous, une sélection de modèles hors du commun : Renault Zoé, Peugeot iOn, ou Citroën C-Zéro.

Ici, on se concentre sur les gammes hybride et électrique, un secteur qui souffre d’une carence en ateliers spécialisés. Pour assurer l’entretien de ces modèles, qui sont de plus en plus nombreux à arpenter les routes de France, une équipe d’experts en mobilité électrique a lancé Revolte en 2020, avec comme slogan, une promesse audacieuse : “électrique ou hybride, votre voiture va durer 100 ans”.

Pourquoi est-il nécessaire de créer un garage spécialisé dans l’entretien et la réparation de véhicules électriques ? Pour le savoir, nous sommes allés à la rencontre d’Alexis Marcadet, cofondateur de Revolte, qui déclare que “Trop souvent, dans les garages traditionnels, l'entièreté d’une batterie est changée alors qu’un seul élément est défectueux.” Pour illustrer ses propos, il prend l’exemple d’un SUV hybride passé par la case Revolte il y a quelques mois “La batterie ne fonctionnait plus, le constructeur proposait de la remplacer par une neuve pour plus de 15.000 euros.” Après une analyse plus poussée, la panne a été localisée en atelier chez Revolte “Au final, la réparation a coûté entre 3 et 4.000 euros, tout en évitant de jeter une batterie”.

Créer un espace dédié aux véhicules électriques, c’est permettre une meilleure expertise, et la réduction du recours aux pièces neuves. Pour s’approvisionner, Revolte se base sur deux piliers : réemploi et reconditionnement. “On travaille beaucoup avec les casses” annonce le cofondateur de l’atelier, et comme le marché de l’électrique est très récent, chaque pièce exploitable se doit d’être récupérée. Ainsi, apparaissent de plus en plus d'entreprises de reconditionnement spécialisées, qui remettent de précieux éléments en circulation.

Ce réflexe du réemploi concerne les pièces isolées, mais également les véhicules entiers, selon Alexis Marcadet “Aujourd’hui une voiture électrique un peu datée, qui n’aurait plus qu’une centaine de kilomètres d’autonomie, serait considérée comme défectueuse. Il faut parfois revoir notre définition d’un véhicule usagé. Une voiture électrique avec peu d’autonomie, remise à bas prix sur le marché, trouverait facilement un acheteur souhaitant effectuer ses trajets quotidiens en électrique à prix bas.”

Depuis 2020, le marché de la voiture électrique a explosé. Selon l’ACEA, l’Association des constructeurs automobiles européens, 12,1 % des véhicules neufs vendus en France en 2022 sont électriques, contre 9,1% en 2021, et 1.9% en 2019. Avec le développement de ce marché viennent les critiques de certains observateurs. Les véhicules électriques sont souvent pointés du doigt pour l’impact environnemental du recyclage de leurs composants. Face aux sceptiques, Alexis Marcadet joue la carte de l’optimisme “Beaucoup de fake news circulent sur le recyclage des batteries” dit-il. “Des entreprises américaines comme Redwood Materials annoncent pouvoir recycler 95% des composants d’une batterie classique.” En bref, selon le cofondateur de Revolte, cet avenir électrique sera responsable, et saura recycler ses déchets !

Si la perspective est brillante pour l'industrie en général, elle l’est aussi pour les e-garages. Avec son concept novateur, Revolte attire des clients venus des quatre coins de la France, et même de Suisse ou de Belgique. Le succès est tel que l’équipe de Revolte n’arrive plus à fournir “On a énormément de véhicules sur liste d’attente” déclare Alexis Marcadet. Faute de place, certes, mais également de main-d'œuvre qualifiée. “C’est un métier nouveau, différent de celui de mécanicien traditionnel. A l’heure actuelle, il n’existe pas de formation pour devenir e-mécanicien, nous avons aussi un rôle à jouer à ce niveau-là”. Pour répondre à la demande, mais également préparer leur expansion, Revolte forme les e-mécaniciens de demain. Dans un nouveau métier, pas de profil type ! L’équipe est assez éclectique : curieux, autodidactes, mécaniciens en reconversion, tout juste sortis d’école, ou en fin de carrière.

À travers une initiative pionnière répondant à une demande du marché, Revolte soulève plusieurs problématiques que pose l’électrification de la mobilité : Rapport au véhicule personnel, question du réemploi, gestion de nouveaux déchets et évolution du métier de mécanicien, qui dans sa forme traditionnelle, est souvent présenté comme une profession en voie d’extinction. Bien entendu, de nombreux défis restent à relever, mais une chose est sûre, la révolte en cours !